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Tunisie : les conséquences économiques de la crise
alayamadmin
Analyse Economique

2011-02
Al Ayam
La « révolution du jasmin » en Tunisie doit nous interroger et nous faire réfléchir sur ce qu’elle a porté et sur ce qu’elle pourrait exporter. Pour beaucoup c’est l’ensemble des pays du Maghreb qui risquent d’être confrontés à la poudrière sociale. Tel n’est pas notre sentiment, car la situation de l’Algérie, du Maroc et de la Tunisie n’est pas comparable dans le domaine démographique, dans le domaine social et dans le domaine économique.
Avec ses 10.5 millions d’habitants, la Tunisie est de loin le moins peuplé de ces trois Etats. Loin derrière les 32,5 millions du Maroc et les 34.9 millions de l’Algérie. Si l’on prend en compte le P.I.B. par habitant, le Maroc est dernier avec 2 770 dollars, la Tunisie est en deuxième place avec 3 720 dollars, juste derrière l’Algérie avec 4 420 dollars. Enfin, dans le domaine du chômage, seul le Maroc affiche un taux inférieur à 10 % (9.6 %), devant une Algérie très proche avec 10 %, mais loin derrière, la Tunisie avec 14.7 %. Enfin, si on prend le chômage des jeunes, qui semble avoir été un des facteurs essentiels de la révolution tunisienne, on constate alors que la Tunisie détient la peu enviable première place avec 31.2 %, suivie de l’Algérie avec 21.5 % et du Maroc avec 17.6 %. Ces statistiques sont celles de la Banque Mondiale.
Il est intéressant d’observer que c’est le pays ayant le P.I.B. par habitant le plus faible des trois qui obtient, dans le domaine du chômage les résultats les meilleurs, sans être pour autant exceptionnels, avec moins de 10 % de chômeurs dans la population active et moins de 18 % pour la population jeune. Par contre, la Tunisie, souvent citée avant cette révolution comme un modèle de développement, notamment par l’Union Européenne, obtient des résultats calamiteux avec près d’un jeune sur trois au chômage, et plus de 50 % des 19.7 % de chômeurs ayant fait des études supérieures. Pire encore à nos yeux, cette situation n’a cessé de se dégrader depuis 10 ans, où les 50 % étaient seulement 20 %. En Algérie, qui dispose pourtant de quelques 150 milliards de dollars de réserve de change, la situation est encore plus incompréhensible, puisque trois chômeurs sur quatre ont moins de trente ans, et 120 000 jeunes diplômés arrivent sur le marché du travail chaque année !
En conséquence, c’est un pays peu doté en ressources naturelles qui obtient les meilleurs résultats. Mieux encore pour le Royaume chérifien, alors que la situation n’a cessé de se dégrader depuis 10 ans en Algérie et en Tunisie, à l’inverses elle n’a cessé de s’améliorer sur la même période au Maroc (voir notre ouvrage « Le Maroc. L’épreuve des faits et des réalisations 1999-2009 », éditions Eska, 2009).
On comprend mieux alors la désespérance des classes moyennes et des jeunes en Tunisie et en Algérie. Et ce d’autant plus qu’à cette situation économique désastreuse, et inexplicable pour l’Algérie, viennent s’ajouter le népotisme de certains et la corruption comme principe de gouvernement. Pour autant, ce qui se passe en Algérie diffère de ce qui s’est passé en Tunisie. En Tunisie, l’élévation du niveau de l’éducation de la population est un fait acquis, et s’est traduit tout naturellement par la soif d’une grande liberté. Ce qui n’est pas nécessairement le cas en Algérie où les manifestations ont cessé dès que le pouvoir annonçait la baisse du prix des denrées alimentaires de base.
Comme on peut donc le constater, les pays du Maghreb ne sont pas du tout confrontés à la même poudrière sociale. Ceux qui ont fait le choix, comme la Tunisie, d’une croissance déséquilibrée laissant un certain nombre de régions à l’écart du développement ont créé les conditions d’une révolution. De même, ceux dont la situation sociale se dégrade régulièrement, comme en Algérie et en Tunisie, ne peuvent être comparés au Maroc dont la situation n’a cessé de s’améliorer depuis 10 ans et qui surtout a la sagesse de lier développement économique et développement social.
Enfin, l’affaire tunisienne, et peut-être l’Algérie demain, montre que népotisme et corruption vont de paire avec révolution. Comme le disait La Fontaine : Bien mal acquis ne profite jamais…